Les Lab0rateurs.trices
Pépinière d'artistesDETAILS
En résidence du 13 au 19 juin
L'équipe
Jeu et mise en scène : Valentine Porteneuve et Elfi Forey
Regard extérieur et régie : Emma Gautrand
Accompagnement dramaturgique : Caroline Bertran-Hours
« La réalité serait-elle, dans son essence, obsessionnelle ? Étant donné que nous construisons nos mondes en associant des phénomènes,je ne serais pas surpris qu’au tout début des temps il y ait eu une associationgratuite et répétée fixant une direction dans le chaos et instaurant un ordre.Il y a dans la conscience quelque chose qui en fait un piège pour elle-même. » Cosmos - Witold Gombrowicz
Intentions
Une traversée poétique dans le monde du petit, des liens, de l’obsession.
Nous nous sommes saisies de ce phénomène que nous connaissons toutes et tous : remarquer soudain un détail. Et à partir de là ?
Je le remarque et il ne m’intéresse pas.
Je le remarque et il me gêne.
Je le remarque et il m’obsède.
Je le remarque et je remarque tous les autres détails que je n’avais jamais vus auparavant comment cela est possible est-ce que ce détail ne serait pas en lien avec celui-là mais celui-ci était-il là auparavant qu’est ce que ça signifie quelle est donc cette relation étroite entre ces choses y-a-t-il un rapport d’importance lequel pourquoi mais si cette chose est là alors ça voudrait dire que celle-ci...
En s’intéressant ainsi aux forces du détail, à ce que les détails nous font intimement, poétiquement, physiquement, nous avons construit une écriture de plateau faite de fragments aux registres de jeu multiples. Nous ne nous attachons pas à créer une narration, mais une suite sensible de tableaux dans lesquels nous essaimons des détails, des liens possibles à reconstituer. Nous proposons aux spectateurs et spectatrices de rentrer dans cette quête de liens entre les choses, dans cette attention minutieuse, dans le jeu de leur propre logique interne.
Pour cela, nous utilisons plusieurs extraits de textes qui viennent tantôt permettre de décrire ou d’interroger des réactions face aux détails et tantôt de plonger dans le vécu-même de ces réactions. Nous jouons avec les descriptions, les accumulations, les obsessions, les points de vue...
Cette envie de parler des détails est née de la rencontre (dans nos têtes, dans nos mains, puis dans nos bouches) entre deux textes : un extrait de City de Alessandro Barrico et de Cosmos de Witold Gombrowicz.
Le premier est une description pseudo-scientifique du phénomène de déflagration intime que peut soudain causer un détail, une chose anodine, chez quelqu’un.e qui le remarque.
Le deuxième nous emmène dans la tête du narrateur qui vit réellement cette expérience. Un détail lui «ouvre des mondes intérieurs» et il se met à construire un raisonnement d’une logique imparable en associant des phénomènes les uns aux autres.
Nous avons été immédiatement attirées par ce que ces deux textes venaient dire de nos vies, de nos rapports aux choses infimes, et des liens complètement subjectifs (et fous !) que nous faisons entre ces détails.
Plus largement, parler des détails nous permet aussi de parler d’un rapport au monde. De nous interroger sur qu’est-ce qui importe dans le monde ? Pour qui et pourquoi ? Qu’est ce qu’on regarde, qu’est-ce qu’on voit et qu’est-ce qu’on ne voit pas ? Qu’est-ce qu’on retient ?
De quelle nature est la hiérarchie entre les choses ?
Qu’est-ce que mon rapport aux détails dit de moi ?
Deux grandes thématiques se sont dégagées de cette joyeuse recherche autour des détails : la
relation amoureuse et l’enquête policière. Vastes terrains où le détail est roi.
Les détails au travers de :
Une oreille, un grain de beauté, une façon de remettre ses cheveux, de dire ce mot, de pincer ses lèvres, de tenir sa cigarette entre l’annulaire et le majeur, de marcher, de froncer les sourcils...
Voilà que je t’aime.
Je t’aime jusqu’aux moindres détails, pour tes détails, par tes détails ?
L’ensemble des détails est ce qui fait une personne, une personnalité. Nous les remarquons, les percevons, ils nous touchent et nous émeuvent, ils nous agacent ou nous blessent. Particulièrement chez la personne aimée.
Nous rendons visibles au plateau toutes ces réactions intérieures, les petits frémissements ou les explosions qu’elles provoquent.
Nous avons envie de parler d’amour. De la manière dont les détails influent directement sur nos façons d’aimer.
Nous revisitons par exemple les blasons du corps amoureux, ces courts poèmes célébrant un détail anatomique féminin. Avec une accumulation de parties du corps et d’adjectifs qui ne vont pas ensemble, nous décalons le point de vue en y injectant de la poésie, de l’humour et de la folie. Nous cherchons ainsi à mêler l’absurdité d’un tel catalogue et en même temps la beauté d’une telle déclaration amoureuse.
Nous nous sommes aussi intéressées au détail comme élément déclencheur de la rupture amoureuse. Un petit geste devient d’un seul coup suffisant pour mettre fin à une relation.
Une amoureuse comprend la fin de l’amour dans un geste anodin de son amoureux et au même moment un oiseau tombe sur leur pare-brise. (ouch)
Pourquoi ces deux choses simultanées ont-elles une importance différente, selon quoi, selon qui ?
Que retenir ? Le geste ou l’oiseau ?
Comment un détail (un oiseau mort est-il un détail ?) peut-il être associé à un évènement bouleversant ?
La figure de l’oiseau qui chute (ouch), de l’oiseau noyé (ouch), de l’oiseau pendu (ouch), est un fil conducteur qui ponctue nos différents tableaux, comme une fugue musicale et esthétique.
La compagnie
Les Lab0rateur.trices - Pépinière d’artistes a été créé fin 2013 à l'initiative de la première classe Labo.
La Classe Labo (ou maintenant "La Classe en Chantiers") est un dispositif de formation inventé conjointement par Les Chantiers Nomades, le Conservatoire de Toulouse et la région Occitanie, afin d’accompagner des jeunes artistes porteurs et porteuses de projets sur le territoire.
Les Lab0rateur.trices se définit comme une structure d’accompagnement permettant un développement des projets portés individuellement et collectivement par ses membres. Compagnie éphémère et transitoire, elle assure un passage structurant entre l’univers de la formation et le monde du travail.
Elle a, par ailleurs, pour vocation de favoriser l’implantation de ces jeunes porteurs et porteuses de projets dans la région Occitanie et de participer ainsi au déploiement artistique et culturel de ce territoire.